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Fin du diesel : le défi de la prime à la casse

04.03.2013

Tiraillés entre les impacts néfastes des moteurs diesels sur la santé et l'importance de cette technologie pour Renault et PSA, les ministres s'opposent sur le financement d'une «prime à la conversion» ciblée sur le gazole.

Plusieurs camps s'opposent au gouvernement sur le diesel. Tous s'accordent à dire que les véhicules les plus anciens roulant augazole polluent le plus, mais les avis divergent sur la marche à suivre pour améliorer la situation.

Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, est favorable à une «prime à la conversion». Cette prime à la casse qui ne veut pas dire son nom (et pour cause, le gouvernement a beaucoup critiqué les mesures précédentes) serait à la fois «une mesure sociale et environnementale». Elle viserait à aider les ménages défavorisés propriétaires d'une voiture diesel à en acquérir une neuve… ou d'occasion récente, ce qui serait une innovation par rapport aux primes prédécentes.

Arnaud Montebourg n'a apporté aucune précision sur un éventuel seuil de revenus pour ces ménages, ni confirmé que la mesure s'appliquerait aux véhicules de plus de 12 ans, qui représenteraient 27 % du parc. «Plus un diesel est antérieur à 2011, plus il est polluant», a rappelé le ministre. Mais pas question de mettre en place «une prime à la casse qui remplit les carnets de commandes des fabricants étrangers». Sans préciser comment il comptait financer la prime, Arnaud Montebourg a écarté une augmentation du diesel. L'écart entre 1 litre d'essence et 1 litre de gazole est de 18 centimes en France «comme en Allemagne», a-t-il affirmé, décidé à «ne pas se laisser dicter une ligne de conduite par la Cour des comptes».

Risque de bloquer les achats
Cette dernière a ouvert la boîte de Pandore en fin de semaine, en soulignant qu'un alignement de la taxation du diesel sur celle de l'essence rapporterait 7 milliards à l'État. Arnaud Montebourg estime que «tout changement de fiscalité risquerait de pénaliser les deux constructeurs français» Renault et PSA, champions du diesel. Rien ne sera fait «sans concertation avec les constructeurs nationaux», a insisté le ministre.

Une position éloignée de celle de la ministre de l'Écologie. Delphine Batho, qui a proposé la prime de conversion, souhaite en plus un alignement des fiscalités du gazole et de l'essence. Elle cible les 60 % du parc auto français équipés de diesel, responsable de «40.000 décès prématurés» par an imputables aux émissions de particules fines.

Coincé entre les enjeux de santé et la nécessité d'éviter les effets pervers d'une prime à la casse (un soutien artificiel et coûteux du marché, qui finit par s'effondrer), Pierre Moscovici, ministre de l'Économie, a botté en touche en expliquant «avoir confié une réflexion sur la fiscalité écologique à un groupe de travail. Aucune forme d'augmentation de la fiscalité sur le diesel n'est prévue.» Au même moment, un conseiller de Matignon évoquait, lui, une «convergence de la taxation sur le diesel et l'essence».

Le salut pourrait venir des voitures hybrides et électriques. Renault dispose d'une gamme de quatre véhicules électriques, PSA privilégie les hybrides diesels (un moteur mi-électrique, mi-thermique) et Smart est le troisième constructeur à produire une voiture électrique en France. En attendant, les ministres prennent le risque de bloquer les décisions d'achat, tandis que le printemps est porteur pour l'automobile, à condition qu'aucun débat sur la fiscalité ne vienne polluer les ventes.